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Section III Opérations de fusion
I. Préparation de l'opération
Définition
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Les opérations de fusion sont définies sur le plan comptable par le règlement CRC 2004-01, voir n° 4351.
Sur cette définition, voir notre ouvrage « Fusions », 2e édition, 2006, question n° 20.
Déroulement de l'opération
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Les opérations de fusion s'accompagnent d'un certain nombre de règles à respecter et de formalités à effectuer. Ces aspects, récapitulés sous la forme d'un « calendrier d'une opération de fusion » (voir n° 4550), sont étudiés dans le Mémento sociétés n° 26300 s. Une fusion peut se dérouler selon deux procédures différentes :
Procédure normale
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Nous en décrivons les différentes étapes dans le calendrier présenté dans les « Compléments pratiques » à la fin du chapitre (voir n° 4550).
Procédure allégée en cas d'absorption d'une filiale à 100 %
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(fusion dite « simplifiée ») Lors de l'absorption par une SA (ou, à notre avis, une SAS ou une SCA) ou une SARL d'une ou plusieurs de ses filiales à 100 %, les obligations suivantes sont écartées (voir détails Mémento sociétés n° 26645 s.) :
- pas d'intervention du commissaire à la fusion ;
L'Ansa (Com.Ansa n° 2454, mars-avril 1989), après avoir rappelé qu'il est interdit, en application de l'article L 236-3 du Code de commerce, de procéder à un échange des droits sociaux - aussi minime soit-il - estime :
- que le calcul du rapport d'échange devient alors inutile et que le projet de fusion n'a pas à le mentionner ; toutefois, il conviendra d'expliquer dans le projet de fusion, la raison pour laquelle l'opération se réalisera sans échange de droits sociaux et donc en absence de rapport d'échange ;
- qu'il n'y a donc aucune création d'actions de la société absorbante et que par conséquent, celle-ci n'augmentera pas son capital (voir n° 4418). - approbation de la fusion par l'AGE de la ou des sociétés absorbées ;
- établissement d'un rapport du conseil d'administration du directoire ou des gérants.
En revanche, dans ce cas, l'article L 236-11 du Code de commerce rend obligatoire la désignation d'un commissaire aux apports.
Remarque Société de personnes détenue à 100 % : le guide d'application « Commissariat aux apports et commissariat à la fusion », CNCC, février 2002, § 45, considère que l'opération de fusion-absorption d'une société de personnes (société civile immobilière par exemple) détenue à 100 % par une SA ne nécessite ni la nomination d'un commissaire à la fusion ni celle d'un commissaire aux apports, aucune augmentation de capital n'étant réalisée.
Valorisation des apports
4364
Détermination de la parité
Voir n° 4352 s.
Valorisation des apports
Les apports sont évalués à la valeur comptable ou à la valeur réelle, selon la situation de contrôle au moment de l'opération et le sens de l'opération (Règl. CRC n° 2004-01, § 4 ; voir n° 4356-1).
Sur les cas particuliers, voir n° 4356-7 (opérations réalisées entre sociétés contrôlées par une même personne physique). Sur les exceptions au principe général de valorisation, voir n° 4357 s.
Sur la détermination des valeurs d'apport :
- en cas d'opérations réalisées à la valeur réelle, voir n° 4360,
- en cas d'opérations réalisées à la valeur comptable, voir n° 4361. Fiscalement, la valorisation des apports retenue sur le plan comptable a une incidence sur le choix du régime fiscal sous lequel placer l'opération (voir n° 4367-1).
Remarque Réévaluation libre préparatoire : en pratique, pour pallier en partie l'impossibilité de réaliser certaines opérations à la valeur réelle, il est possible, à notre avis, de procéder, préalablement à l'opération, à une réévaluation libre de l'ensemble des immobilisations corporelles et financières, conformément aux dispositions de l'article L 123-18 du Code de commerce, mais pas des immobilisations incorporelles (en ce sens, Bull. CNCC n° 129, mars 2003, Chr. 40 ; voir n° 3355 s.).
Fiscalement, les conséquences d'une réévaluation libre préalable à une fusion ou opération assimilée sont les suivantes :
a. Imposition de la plus-value de réévaluation : cette imposition, en principe effectuée au taux de droit commun, peut, pour certains actifs immobiliers être effectuée au taux de 16,5 %, voir n° 3357-1.
b. Absence d'abus de droit : infirmant la doctrine administrative (D. adm. 4 I-1242, n° 88), la Cour administrative de Douai (22 mai 2001, n° 96-2857, décision définitive contre laquelle l'Administration ne s'est pas pourvue en cassation) a jugé que la réévaluation libre à laquelle procède une société déficitaire à la clôture de l'exercice précédant son absorption par une autre société n'est pas constitutive d'un abus de droit. Les conséquences pratiques de cette réévaluation ainsi qu'un tableau de synthèse des avantages que procure une telle opération sont présentés dans notre ouvrage « Fusions », 2e édition, 2006, question n° 41.
Importance du projet de fusion
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Le projet de fusion est le principal document retraçant les opérations financières et comptables engagées entre les sociétés. Il doit comprendre un certain nombre d'indications destinées à retracer la réalité de l'opération sur les plans économique et juridique et permettre de la traduire comptablement dans les sociétés qui se réunissent.
Sur le plan juridique (art. D 254, al. 2)
Ces indications concernent :
1. la forme, la dénomination et le siège social de toutes les sociétés participantes ;
2. les motifs, buts et conditions de la fusion ;
3. la désignation et l'évaluation de l'actif et du passif dont la transmission aux sociétés absorbantes ou nouvelles est prévue (en pratique, le projet ne contient que l'indication de grandes masses : immobilisations, stocks, valeurs réalisables, etc., le détail étant renvoyé à des annexes) ;
Sur les conséquences des opérations réalisées durant la période intercalaire, voir n° 4500 s.
4. les modalités de remise des parts ou actions et la date à partir de laquelle ces parts ou actions donnent droit aux bénéfices, ainsi que toute modalité particulière relative à ce droit ;
5. la date à partir de laquelle les opérations de la société absorbée seront, du point de vue comptable, considérées comme accomplies par la société bénéficiaire des apports ;
Sur les conséquences pratiques de cette date, voir n° 4500 s.
6. les dates auxquelles ont été arrêtés les comptes des sociétés intéressées, utilisés pour établir les conditions de l'opération ;
7. le rapport d'échange des droits sociaux et, le cas échéant, le montant de la soulte ;
8. le montant prévu de la prime de fusion ;
9. les droits accordés aux associés ayant des droits spéciaux et aux porteurs de titres autres que des actions ainsi que, le cas échéant, tous avantages particuliers.
Remarques :
a. Rapport d'échange Les méthodes d'évaluation utilisées et les motifs du choix du rapport d'échange, étant donnés dans le rapport du conseil d'administration (voir n° 4530-2), n'ont pas à être exposés dans le projet de fusion.
b. Fusion avec effet différé Le projet de fusion doit comporter une mention précisant que l'évaluation à la date d'effet différée des valeurs d'apport est faite sous la condition résolutoire des valeurs comptables définitives telles qu'elles seront fixées à la date d'effet (avis CU CNC n° 2005-C, question n° 20). Pour plus de détails, voir notre ouvrage « Fusions », 2e édition, 2006, question n° 92.
c. Fusion aux valeurs comptables sans effet rétroactif Par analogie avec le traitement retenu en cas d'effet différé (voir n° 4361 et b. ci-avant), le traité d'apport devrait comporter, à notre avis, une mention précisant que l'estimation des valeurs comptables est réalisée sous la condition résolutoire des valeurs comptables définitives à la date d'effet de l'opération (jour de l'AGE).
d. Erreur dans le traité de fusion Si une erreur significative est relevée dans le traité de fusion (par exemple sur le montant de la prime de fusion) après son approbation par l'assemblée, seule une nouvelle assemblée pourra valider le correctif au traité de fusion (Bull. CNCC n° 125, mars 2002, Chr. 30).
Sur le plan comptable
I. Statut comptable du projet de fusion Du fait de l'obligation de retenir une valeur d'apport définie (comptable ou réelle) pour une situation donnée (voir n° 4356), le projet de fusion est devenu comptable, c'est-à-dire qu'il doit suivre les règles comptables. Pour plus de détails sur ce rôle comptable, voir notre ouvrage « Fusions », 2e édition, 2006, question n° 69.
II. Base de la comptabilisation Le rôle essentiel du projet de fusion, pour la traduction comptable de l'opération de fusion, doit également être souligné. Le projet, après son approbation par l'assemblée des actionnaires ou des associés, constitue la pièce justificative pour la comptabilisation de l'opération dans la société absorbante ou nouvelle (des annexes détaillées de caractère extra-comptable étant néanmoins nécessaires, pour aider à la comptabilisation des opérations). Aussi, la plus grande attention doit-elle être accordée à son contenu et à sa rédaction, pour que, sous son aspect tant juridique que comptable et fiscal, il ne puisse pas prêter à contestation.
Sur la communication et la publicité du projet de fusion, voir calendrier n° 4550-2 et 4550-3.
Sur le plan fiscal
Les principales mentions à porter dans le traité d'apport sont :
- en cas d'option pour le régime de faveur en matière d'IS (voir n° 4366 s.), mention dans le projet de fusion des engagements pris par la société absorbante conformément à l'article 210 A du CGI (voir Mémento fiscal n° 3498 s.) ;
En cas de fusion aux valeurs comptables, il doit être procédé dans le projet de fusion (en annexe) à l'éclatement de la valeur nette comptable entre la valeur d'origine, les amortissements et les dépréciations (Bull. CNCC n° 94, juin 1994, p. 311 s.). A défaut, la valeur telle qu'elle figure sur le projet doit être comptabilisée et l'entreprise ne peut, selon l'Administration, bénéficier du régime fiscal de faveur (Bull. précité, BOI 4 I-2-00, n° 80 et BOI 4 I-1-05, n° 14, voir n° 4356-1), et l'opération est fiscalement réputée réalisée aux valeurs réelles.
- l'option éventuelle en faveur du régime dérogatoire à la règle de l'imposition immédiate de la fraction de la subvention d'investissement restant à imposer afférente aux actifs apportés (voir n° 4382) ;
- en cas de réévaluation antérieure des titres de la société absorbée par la société absorbante, le virement de l'écart de réévaluation à la prime de fusion (voir n° 4424).
II. Aspects fiscaux
Présentation
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Afin de faciliter les regroupements d'entreprises, la loi fiscale prévoit, en faveur des fusions, un régime spécial comportant des avantages en matière d'IS et de droits d'enregistrement. D'autres dispositions sont par ailleurs prévues, notamment en matière de TVA et de taxes assises sur les salaires.
Impôt sur les sociétés
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Sous certaines conditions, les sociétés peuvent se placer sur option sous un régime spécial de faveur qui a pour objet de conférer à la fusion un caractère intercalaire. A défaut, la fusion entraîne, en principe, les conséquences fiscales d'une cessation d'entreprise.
Pour pouvoir être placée sous le régime de faveur, l'opération doit :
- répondre à la définition fiscale des fusions de l'article 210-0 A du CGI (sur cette définition, voir notre ouvrage « Fusions », 2e édition, 2006, question n° 20) ;
- être réalisée entre personnes morales ou organismes passibles de l'impôt sur les sociétés (CGI, art. 210 C-1) ;
- être réalisée entre sociétés ayant leur siège dans un Etat de l'UE ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales (CGI, art. 210-0 A II). Nous résumons les dispositions des deux régimes dans les tableaux comparatifs ci-après qui tiennent compte des conséquences fiscales des nouvelles règles sur les fusions et les actifs (BOI 4 I-1-05 et 4 A-13-05) : Pour plus de détails, voir Mémento fiscal n° 3451 s.
I. Obligations et droits de la société absorbée
| Régime de droit commun
| Régime de faveur
| Imposition des plus-values (fiscales) d'apport sur l'ensemble des éléments d'actifs apportés (immobilisations et actifs circulants)
| OUI, même si la fusion est réalisée comptablement à la valeur comptable (1) (mais, dans ce cas, contrepartie pour la société absorbante lors de la cession des actifs : voir tableau ci-après au II-1)
| NON, mais obligations corrélatives pour la société absorbante (voir tableau ci-après au II-1)
| Imposition du bénéfice de l'exercice en cours
| OUI (2)
| OUI (2)
| Imposition des résultats en instance d'imposition (plus-values sur immobilisations non amortissables reçues dans le cadre d'une fusion, d'un apport partiel d'actif ou d'une scission, etc.)
| OUI
| NON
| Imposition ou déduction immédiate des impacts (positifs ou négatifs) de la 1re application de l'approche par composants restant à étaler sur 5 ans
| OUI
| NON (possibilité de poursuite de l'étalement par la société absorbante ; voir tableau ci-après au II-1)
| Sort des provisions
| Imposition de toutes les provisions (y compris provision pour hausse des prix) (3)
| Imposition des seules provisions devenues sans objet
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