II.Synthèse d’un moteur moléculaire incorporant des fragments isolants inorganiques Une fois vérifié le caractère isolant du motif trans-platine, nous nous sommes intéressés à la synthèse d’un moteur moléculaire incorporant des fragments isolants trans-platine entre le Cp central et les groupements électroactifs ferrocènes. Afin de mettre au point les conditions de synthèse, l’élaboration d’un moteur avec un stator non fonctionnalisé (plus facile d’accès) a d’abord été développée.
1.Stratégie de synthèse Deux stratégies convergentes ont été envisagées pour obtenir le moteur cible (31) (Figure 42). La première approche consiste à utiliser une réaction de quintuple couplage catalysée au palladium comme étape clef de connexion entre le cœur organométallique 13 et les bras incorporant le fragment isolant trans-platine. Comme pour le premier prototype synthétisé par Alexandre Carella une réaction de couplage de type Negishi est envisagée entre les bromes du complexe 13 déjà décrit [35] et l’alcyne vrai du complexe trans-platine 34.

Figure 42 : Analyse rétrosynthétique.
La deuxième approche consiste à réaliser la connexion entre les bras isolants et le cœur du moteur par une réaction d’échange de ligands. La coordination de cinq complexes trans-chloro-platine 32 aux alcynes du complexe de ruthénium 44 devrait permettre d’obtenir le moteur 31.
Étant plus courte en termes de nombre d’étapes, la première approche a été essayée en premier.
2.Première approche Le complexe de ruthénium 13 étant décrit, il ne reste plus qu’à mettre au point la synthèse d’un synthon incorporant à la fois un groupement électroactif ferrocène, un fragment trans-platine isolant et une fonction alcyne.

Figure 43 : Bras isolants synthétisés.
Deux synthons plus ou moins long ont été envisagés. Le complexe l’éthynyl- (ferrocényléthynyl)bis(triéthylphosphine)platine(II) 34 est une première possibilité et peut être synthétisé en partant d’un complexe dichloroplatine(II), par déplacements successifs des deux chlorures. Un second fragment isolant plus long que le précédent, où le platine est incorporé via l’addition oxydante d’un iodure d’aryle sur un platine(0), a aussi été envisagé. Le synthon final présentera un platine coordiné par le fragment électroactif éthynylferrocène et le p-éthylnylphényl (39). Ces deux "bras" permettent de facilement moduler la taille de la molécule qui aura un diamètre de 3 nm avec 34 et 4 nm avec 39 (modélisation moléculaire avec Cérius 4.2).
a)Synthèse du "bras" fonctionnalisé court La synthèse du complexe 34 (Schéma 10) commence par la substitution d’un chlorure du trans-dichlorobis(triéthylphosphine)platine(II) par un fragment éthynylferrocène [81]. Le complexe de platine (II) et l’éthynylferrocène (1 équivalent) sont chauffés à reflux dans le chloroforme en présence de diéthylamine pendant 36 heures. Après purification par chromatographie sur colonne, le complexe 32 est obtenu avec un rendement de 74%. La géométrie trans peut être vérifiée en exploitant la valeur de la constante de couplage 1JP-Pt. En effet dans ce type de complexes, le couplage cis est beaucoup plus important (~ 3500 Hz) que le couplage trans (~ 2400 Hz) [82]. Un couplage de 2405 Hz a été observé, confirmant la géométrie trans. Le rendement de la réaction peut être amélioré en utilisant un chauffage par irradiations micro-ondes dans un tube sous pression. Ainsi, après 15 min de chauffage micro-ondes à 113°C, 32 a été obtenu avec un rendement de 86%. L’utilisation des micro-ondes permet, dans ce cas, à la fois un gain de temps et de rendement.

Schéma 10 : Synthèse du fragment 34.
La complexation de l’acétylène a été envisagée en utilisant de l’acétylène monoprotégé à l’aide d’un groupement triisopropylsilyle (TIPS) afin d’éviter les risques d’obtention de produits binucléaires. Dans les mêmes conditions réactionnelles que pour la première étape avec un excès de triisopropylsilylacétylène (TIPSA), 33 n’est obtenu qu’avec 10% de rendement, les réactifs étant récupérés après colonne. L’utilisation des conditions de Sonogashira [60] (CuI (cat.) dans la diéthylamine à température ambiante) a permis d’obtenir 33 avec un rendement de 72%.
La déprotection du groupement TIPS est normalement réalisée par le fluorure de tétrabutylammonium (TBAF) dans le THF avec 5% d’eau à température ambiante [83]. Néanmoins dans ces conditions 33 n’a pas pu être déprotégé. Le chauffage à reflux ou l’utilisation de KF avec un éther couronne (18-O-6) n’a pas non plus permis d’obtenir 34, seuls quelques pourcents ont été isolés. La stabilité exceptionnelle vis-à-vis des fluorures du TIPS semble être due à une conjugaison d’effets stériques, provenant des groupements triéthylphosphines, et électroniques dus au platine qui doivent renforcer la liaison silicium-carbone. En effet, nous n’avons trouvé aucun exemple dans la littérature de déprotection d’alcyne directement lié à un platine. Devant cette impossibilité à déprotéger la fonction alcyne avec un rendement acceptable, nous avons envisagé d’utiliser comme groupement protecteur le triméthylsilyle (TMS) qui présente l’avantage d’offrir une voie de déprotection orthogonale au TIPS (K2CO3 THF/MeOH).
Avant d’utiliser le triméthylsilylacétylène nous avons toutefois fait un essai en utilisant directement l’acétylène gazeux qui s’est avéré concluant. En effet, en faisant barboter de l’acétylène dans une solution de 33 dans la diéthylamine avec une quantité catalytique de CuI à température ambiante pendant 20 minutes, 34 a été obtenu avec un rendement de 91%. Aucun produit de couplage de type Glaser ou de complexes binucléaires de type Pt-CC-Pt n’ont été observés. Ainsi, 34 a été obtenu en deux étapes avec un rendement global de 78%.
b)Synthèse du "bras" fonctionnalisé long L’introduction du platine dans le second synthon est réalisée via une étape d’addition oxydante d’un iodure d’aryle sur un complexe de platine(0) (Schéma 11). Le 4-éthynyliodobenzène a été synthétisé avec la fonction alcyne protégée afin d’éviter la formation de complexes dinucléaires lors de l’étape d’introduction de l’éthynylferrocène. Le couplage du TIPSA avec la 4-iodoaniline dans les conditions de Sonogashira [84] nous a permis d'obtenir la 4-(triisopropylsilyl)éthynylaniline 35 avec un rendement de 30% après purification. La conversion de la fonction amine en dérivé iodé a été réalisée par une réaction de type Sandmeyer [85]. La réaction du nitrite de sodium sur 35 dans l’acide chlorhydrique concentré à 0°C permet d’obtenir le sel de diazonium correspondant. Après addition d’iodure de potassium à 0°C et retour à température ambiante, 36 est obtenu avec un rendement de 61% après purification par chromatographie sur colonne.

Schéma 11 : Synthèse du bras isolant 39.
L’addition oxydante de l’iodure d’aryle 36 sur le Pt(0) est réalisée par le chauffage à reflux de 36 et du tétrakis(triphénylphosphine)platine(0) dans le toluène pendant 18h [86]. Après purification par chromatographie sur colonne de silice, 37 est obtenu sous forme d’un solide blanc avec un rendement de 86%. L’introduction du fragment électroactif éthynylferrocène est réalisée comme pour le "bras" court dans les conditions de Sonogashira [87]. Après purification, 38 est obtenu avec un rendement de 42%. La protection de la fonction alcyne du ligand aryle est nécessaire pour éviter une réaction de couplage entre deux molécules 37 qui pourrait donner lieu à des polymères organométalliques. La dernière étape de déprotection de la fonction alcyne effectuée avec le fluorure de tétrabutylammonium conduit à 39 avec un rendement de 82%. Dans le complexe 38 la fonction alcyne est suffisamment éloignée du platine et se comporte normalement. Ce qui nous permet de penser que c'est le platine, lorsqu'il est directement connecté à l'alcyne, qui modifie fortement sa réactivité.
Nous avons ainsi obtenu un "bras" plus long, prêt à être accroché au cœur organométallique grâce à sa fonction alcyne libre par une réaction de couplage de type Negishi.
c)Connexion des "bras" avec le pivot central La stratégie modulaire choisie pour la synthèse du moteur permet de connecter les synthons incorporant un fragment isolant au cœur organométallique du moteur à l’aide d’une réaction de couplage catalysée par le palladium. Les conditions de Negishi ayant donné de bons résultats avec l’éthynylferrocène nous avons essayé directement le couplage entre le bras 34 et le complexe de ruthénium 13.
La solution d’organozincique issue de 34 est obtenue en faisant réagir le butyllithium sur 34 dans le THF suivi de l’addition de chlorure de zinc. L’organozincique (10 eq. soit 2 eq. par brome) et 13 sont chauffés à reflux dans le THF en présence de Pd(PPh3)4. Au bout de 24 heures, du catalyseur et 10 equivalents d’organozincique sont rajoutés et le milieu réactionnel est chauffé à reflux un jour supplémentaire. Un grand nombre de produits colorés (contenant un groupement ferrocényl) ont été obtenus. Malheureusement, les analyses par RMN et spectrométrie de masse MALDI-TOF ont montré l’absence du produit de couplage attendu.

Schéma 12 : Tentative de couplage entre 13 et 34.
Devant cet échec, nous avons voulu tester la réactivité des deux synthons dans les conditions de Negishi face au p-(tert-butyl)bromobenzène (Schéma 13). En effet, le groupement tert-butyle désactive le brome et permet ainsi de modéliser la réactivité du complexe de ruthénium 13. De plus, les protons de ce groupement qui apparaissent sous la forme d’un singulet constituent une sonde RMN intéressante.

Schéma 13 : Réactions tests de couplage de Negishi.
La réaction de couplage effectuée dans les mêmes conditions que précédemment avec le synthon le plus court (34) conduit au produit de couplage avec un rendement de seulement 10%. Les conditions de Negishi ne semblent donc pas être satisfaisantes pour effectuer le quintuple couplage sur 13. Ce faible rendement est peut être dû à l’instabilité du complexe de platine face à une base forte comme le butyllithium.
Le synthon plus long (39) présente l’avantage d’éloigner la fonction alcyne vrai du complexe de platine. De plus les ligands triphénylphosphines sont plus encombrants que les triéthylphosphines et devraient mieux protéger le platine. La réaction de couplage de Negishi entre le bras 39 et le p-(tert-butyl)bromobenzène donne le produit de couplage attendu. Malheureusement le rendement de 40% obtenu n’est pas encore suffisant pour que la réaction de quintuple couplage soit viable (5 réaction à 40% donnant un rendement global de 1%).
3.Deuxième approche Face aux problèmes de couplage rencontrés dans la première approche, nous avons décidé d’essayer de suivre une stratégie alternative permettant d’introduire le fragment isolant dans des conditions douces par une étape d’échange de ligand. Pour cela, la synthèse du complexe de ruthénium avec un plateau fonctionnalisé avec des alcynes (44) est nécessaire. Deux stratégies étaient envisageables (Figure 44), la première en utilisant un quintuple couplage de Negishi entre le complexe pentabromé 13 et un acétylène monoprotégé. La seconde en développant un nouveau ligand penta(p-éthynylphényl)cyclopentadiène. Le complexe 13 étant difficilement accessible en grande quantité, nous avons développé la deuxième stratégie en partant du composé 11 facilement disponible en grande quantité.

Figure 44 : Analyse rétrosynthétique.
a)Un nouveau ligand : le penta(4-éthynylphényl)cyclopentadiène La réaction de couplage de Sonogashira entre un excès de triisopropylsilylacétylène (deux fois 20 équivalents) et 11 conduit au produit de quintuple couplage 40 avec une excellente sélectivité et un rendement de 81%. Les cinq bromes liés aux groupements phényles ont donné lieu à un couplage tandis que le brome lié au Cp a été remplacé par un hydrogène. Au niveau du Cp, la réaction d’addition oxydante du palladium doit avoir eu lieu, mais probablement à cause de la gêne stérique, l’étape d’élimination réductrice ne se fait pas et on observe un produit de réduction.

Schéma 14 : Synthèse du ligand 40.
Un nouveau ligand hétéropolytopique penta(4-éthynylphényl)cyclopentadiène a donc été obtenu [88]. En effet, il possède un site de coordination au niveau du Cp central et cinq possibilités de coordination via les fonctions alcynes une fois déprotégées. Ce ligand possède aussi une photochimie intéressante puisqu’il est fluorescent avec une émission dans le bleu à 470 nm.
b)Tentatives de coordination directe Dans la littérature, la seule méthodologie décrite pour coordiner un ligand pentaphénylcyclopentadiène à un ruthénium est celle développée par Manners [89]. Elle consiste à réaliser l’addition oxydante du Cp bromé sur le cluster de ruthénium carbonyle (Ru3(CO)12). Cependant, étant donné que le ligand 40 est sous forme de CpH nous avons tenté de le coordiner directement sans utiliser la méthodologie de Manners. Nous nous sommes inspirés des nombreux exemples de coordination directe du cyclopentadiène (CpH) et du pentaméthylcyclopentadiène (Cp*H) qui sont décrits dans la littérature [90-93].
Plusieurs voies ont été envisagées suivant la source de ruthénium utilisée (Figure 45). RuCl3 est connu pour réagir avec Cp*H dans l’éthanol pour former un polymère [Cp*RuCl2]n qui peut être réduit en présence d’un arène pour donner le complexe [Cp*Ru(arène)]+ correspondant.
Nous avons essayé d’adapter cette procédure avec les ligands pentaphényl cyclopentadiène. Le chauffage à reflux du pentaphénylcyclopentadiène dans l’éthanol en présence de benzène n’a donné lieu à aucune réaction [92]. Le ligand commercial pentaphénylcyclopentadiène étant peu soluble nous avons essayé avec le ligand 40 qui est plus soluble grâce aux groupements triisopropylsilyle. Ainsi le chauffage à reflux du ligand 40 avec RuCl3 dans l’éthanol en présence de poudre de zinc n’a pas donné lieu à une réaction [90, 91]. Il semble que ces ligands soient trop encombrés pour réagir avec le ruthénium.

Figure 45 : Tentatives de coordination directe du ligand 40.
Une tentative avec [Ru(p-cymène)Cl2]2 comme source de ruthénium n’a pas été plus fructueuse. L’addition de n-BuLi sur le pentaphénylcyclopentadiène dans le THF à -78°C permet de former le pentaphénylcyclopentadiénure de lithium qui est mis à réagir avec [Ru(p-cymène)Cl2]2 à température ambiante [94]. Après évaporation du solvant et métathèse de l’anion par NH4PF6, un précipité vert est obtenu après filtration. Les analyses par RMN et par spectrométrie de masse ont montré que ce produit ne correspondait pas au complexe attendu.
c)Synthèse du complexe précurseur de ruthénium Devant l’impossibilité de coordiner directement le ligand 40, nous avons décidé de réintroduire le brome au niveau du Cp afin de pouvoir utiliser la méthodologie de Manners (Schéma 15). Dans le THF, Le ligand 40 est déprotoné par le n-butyllithium à -78°C, le cyclopentadiénure ainsi généré réagit alors avec le N-bromosuccinimide (NBS) pour donner, après purification par chromatographie sur colonne, le ligand bromé 41 avec 65% de rendement. Le ruthénium est ensuite coordiné au ruthénium par addition oxydante sur le cluster Ru3(CO)12 dans le toluène. Après purification par chromatographie sur colonne 42 est obtenu avec un rendement de 72%. La coordination du ligand tripodal Tp4Bo est réalisée par chauffage du complexe de ruthénium 42 avec deux équivalents de KTp4Bo dans le THF pendant 24 heures. Un produit secondaire de même polarité que le complexe 43, difficilement séparable, est aussi formé lors de la réaction. Une seconde purification par chromatographie a été nécessaire pour obtenir 43 pur avec un rendement de 30%. Les alcynes sont déprotégés par réaction avec le TBAF dans le THF pour donner le complexe désiré 44.

Schéma 15 : Synthèse du complexe de ruthénium précurseur (44).
d)Un moteur moléculaire incorporant des fragments trans-platine Comme nous l’avons vu précédemment, le moteur cible 31 n’avait pu être obtenu par la première approche consistant à réaliser un quintuple couplage de Negishi. En revanche la deuxième stratégie basée sur un échange de ligands a été plus fructueuse [88].
La réaction à température ambiante du complexe de ruthénium 44 avec le complexe chloroplatine 32 dans un mélange de THF et de diéthylamine en présence d’une quantité catalytique d’iodure de cuivre a bien donné lieu à la formation du produit de quintuple couplage. Après purification par chromatographie sur colonne, le moteur 31 a été obtenu avec un rendement remarquable de 41% correspondant à 84% par étape d’échange de ligands.

Schéma 16 : Synthèse du moteur incorporant des fragments isolants inorganiques (31).
Le moteur a été complètement caractérisé par RMN 1H, 13C, 31P et 195Pt. Le spectre proton montre clairement dans la région des protons aromatiques le système AA’BB’ des protons des groupements phényles attachés au Cp central ainsi que les protons du ligand Tp4Bo. Les protons des ferrocènes apparaissant sous la forme d’un singulet et de deux triplets intègrent bien pour 45. La libre rotation du rotor a été observée jusqu’à -90°C par RMN. Le spectre RMN 31P présente un singulet et un doublet satellite dû au couplage avec le 195Pt (33% d’abondance naturelle). La constante de couplage JP-Pt de 2374 Hz est en accord avec une géométrie trans des complexes de platine. La spectrométrie de masse MALDI-TOF a aussi confirmé l’obtention de la molécule.
31P 1H
Figure 46 : Spectres RMN (500 MHz, CD2Cl2) 1H et 31P du moteur 31.
La voltamétrie cyclique du composé 31 a montré deux vagues d’oxydation réversibles à 0,31 V/ECS et 0,60 V/ECS correspondant respectivement au fer et au ruthénium (Figure 47). Ces valeurs sont plus faibles que celles observées pour le complexe sans platines (15) où les éthynylferrocènes sont connectés directement au pentaphényl Cp (0,52 V/ECS pour le fer et 0,82 V/ECS pour le ruthénium). Le caractère donneur des ligands triéthylphosphines enrichit le platine en densité électronique et ainsi stabilise les degrés d’oxydation (III) du fer et du ruthénium.

Figure 47 : Voltamétrie cyclique du moteur 31 (CH2Cl2, n-Bu4PF6 0,1 M, vitesse de balayage de 100 mV/s).
L’oxydation complète du composé 31 par électrolyse suivie de sa réduction n’a pas montré de dégradation du complexe, démontrant sa robustesse électrochimique. De plus le suivi par spectroscopie Visible-proche IR de l’oxydation électrochimique de 31 a montré l’absence de bande intervalence. Cela confirme l’utilité des fragments isolants trans-platine.
4.Moteur moléculaire fonctionnalisé Une fois obtenu le moteur au stator non fonctionnalisé (31), nous avons envisagé la synthèse de son analogue avec un stator fonctionnalisé pour s’accrocher sur une surface d’oxyde (Schéma 17) [58]. Ce travail a été réalisé par Stéphanie Sistach dans le cadre d’un stage de Master.
La synthèse reprend le complexe de ruthénium 42 avec un plateau aux alcynes protégés. La coordination du ligand Tp4Bo,6-COOEt est réalisée par irradiation micro-ondes dans un mélange d’acétonitrile et de DMF, pour donner après purification par chromatographie sur colonne, le complexe 45 avec un rendement de 17%. Les alcynes sont déprotégés par réaction avec le fluorure de tétrabutylammonium donnant le complexe 46 avec 54% de rendement après purification.
La dernière étape consiste à coordiner les cinq alcynes libres de 46 à cinq fragments trans-(ferrocényléthynyl)bis(triéthylphosphine)platine(II). La réaction entre le complexe de ruthénium 46 et le complexe de platine 32 en présence d’iodure de cuivre dans un mélange de THF et de diéthylamine conduit au produit de quintuple couplage 47 avec un rendement de 35% après purification. Cela correspond à un rendement de 81% par étape. Le moteur 47 a été totalement caractérisé par RMN multinucléaire et spectrométrie de masse MALDI-TOF.

Schéma 17 : Synthèse du moteur fonctionnalisé incorporant des fragments isolants platine (47).
Cette molécule est un premier exemple de moteur moléculaire remplissant tous les critères énoncés dans le design. En effet, le stator est fonctionnalisé par des groupements esters afin d’ancrer le moteur à une surface isolante d’oxyde et le rotor incorpore des fragments isolants trans-platine pour minimiser les transferts électroniques intramoléculaires entre groupements électroactifs.
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