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Symptômes psycho-comportementaux au cours des démences chez la personne âgée (SPCD) Dr B. Pradines, 26 juin 2008 IFSI du CH Albi. Site web : http://users.aol.com/Dgeriatrie/ PLAN de l'exposé : Introduction I. Définitions des troubles du comportement II. Quels sont les troubles du comportement habituellement rencontrés chez la personne âgée ? III. Conséquences des troubles du comportement chez les aidants informels et formels IV. Evaluation des troubles du comportement V. Signification des troubles du comportement VI. Connaissance du patient présentant des troubles du comportement VII. Observation du patient présentant des troubles du comportement VIII. Traitement du patient présentant des troubles du comportement Conclusion Bibliographie ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Introduction L'agressivité et l'agitation constituent un obstacle important à la socialisation du sujet âgé en famille ou en institution (Léger et al. 2001). De plus, elles contredisent la conception selon laquelle la sagesse (calme, maîtrise des émotions, capacité d'arbitrage des conflits) est liée à l'avancée en âge. La prise en compte de ces signes et symptômes est nécessaire car ils contribuent à l'augmentation de la désadaptation du patient à son environnement, à la majoration du coût de la prise en charge, à un déclin cognitif plus rapide et aux conflits relationnels avec l'entourage (Ohnen S.H., 2002). Ces comportements sont un vrai défi quotidien pour les soignants à domicile et dans les institutions gériatriques. I. Définitions des troubles du comportement Chez le sujet âgé, les symptômes psycho-comportementaux peuvent se définir comme des conduites et des attitudes inadaptées aux lieux et aux situations en référence aux normes culturelles communément admises (Ohnen S.H., 2002). Il faut noter d'emblée que les termes de "symptômes psycho-comportementaux" ou de "troubles du comportement" sont sujets à caution car ils supposeraient une responsabilité exclusive de la personne âgée dans les comportements inadaptés évoqués ici. Il s'agit d'une définition relative et non absolue, les normes évoquées ci-dessus étant variables suivant les lieux et les époques. L’Association Psychogériatrique Internationale donne la définition suivante : « signes et symptômes comportementaux et psychologiques de la démence » définis comme les signes et les symptômes évocateurs de troubles de la perception, du contenu des pensées, de l'humeur et des comportements. Cette dernière définition a le mérite de souligner le fait qu’il n’existe pas de démence sénile sans trouble du comportement. Pour Léger, l'agitation est une attitude de violence envers une cible dont l'expression peut être physique ou verbale, dirigée contre un objet, un tiers ou contre soi-même (Léger et al. 2001). II. Quels sont les troubles du comportement habituellement rencontrés chez la personne âgée ? Une observation fine des débuts des démences laisse apparaître des troubles souvent précoces. Toutefois, ces troubles sont d'autant plus pénibles pour le patient et pour son entourage que la maladie évolue. Leur déclenchement nécessite souvent un fort stimulus désagréable en début d'évolution. Il n'en est pas de même au fur et à mesure que la pathologie s'aggrave, au point de poser un problème ardu de recherche du facteur déclenchant. A) Les troubles positifs du comportement, encore qualifiés de productifs. Les troubles sont qualifiés de "positifs" lorsqu'ils deviennent dérangeants pour l'environnement humain et matériel : agitation, déambulation, agressivité, cris, impatiences, fugues, comportements culturellement inappropriés, désinhibition sexuelle, ablation ou détérioration des perfusions ou des pansements. La fréquence des troubles "positifs" du comportement est élevée au cours des maladies démentielles. Du fait de leur fréquence et de la grande féminisation des professions soignantes, les troubles du comportement sexuels sont un problème fréquent en pratique gériatrique. Ils sont presque toujours l'apanage des hommes âgés. Quelques hypothèses personnelles sur leur genèse : - la désinhibition qui permet au désir de ne pas subir le contrôle de la raison. - le contact physique socialement réservé à la sexualité, surtout à partir d'un certain âge, - la fonction de reproduction toujours efficiente chez l'homme, quasiment jusqu'à la fin de la vie, - la notion du "plongeon rétrograde" qui ramène l'homme âgé dément à un vécu d'homme jeune, - la proximité du corps avec un soignant qui est le plus souvent avec une jeune soignante, - une culture masculine "active" fondée sur la proposition, - la proximité de la mort qui pourrait entraîner une réactivation de la pulsion de vie dans une optique inconsciemment reproductive, afin de se survivre. Les descriptions de l'agitation varient. Certaines se référent à des comportements sans objet, ou encore socialement inappropriés. Cohen-Mansfield (Cohen-Mansfield et al. 1989) trouve, chez 408 résidents, 29 malades atteints de troubles du comportement à prédominance diurne. Les troubles les plus fréquents sont pour cet auteur : l'agitation, la déambulation, les phrases répétitives, les appels à l'attention, les plaintes, le négativisme et les jurons. B) Les troubles du comportement sont le plus souvent "négatifs" Ils se manifestent sous la forme d'un retrait, d'une apathie (indifférence affective), d'une adynamie, d'une démotivation globale, voire d'une somnolence quasi constante. Il est aussi possible de retrouver : le mutisme, la tristesse et l'insomnie calme. Ces troubles passent souvent inaperçus ou peuvent être relativement bien tolérés par l'entourage. Et encore : l'alitement sans explication organique, le refus de s'alimenter ou de prendre son traitement. Ces modalités comportementales anormales sont les plus fréquentes chez les patients déments hébergés et soignés dans le service de Soins de Longue Durée du Centre Hospitalier d'Albi. C) Fréquence des troubles du comportement Pour Chung (Chung et al. 2000), les symptômes neuropsychiatriques sont fréquents au cours de la maladie d'Alzheimer. Des changements de la personnalité, une perturbation de l'humeur et des signes psychotiques sont fréquemment constatés. Ils peuvent coexister chez le même malade. Ces symptômes sont associés à un déclin rapide, à la fois cognitif et fonctionnel, pouvant mener à l'entrée en institution. Pour Kunik (Kunik et al. 2000), il n'y avait pas, chez 150 patients gérontopsychiatriques, de différence notable dans les troubles du comportement entre ceux qui souffraient de maladie d'Alzheimer, de démence vasculaire, de démence consécutive à l'alcoolisme ou bien de démence d'origine multiple. Toutefois, les patients atteints de démence vasculaire étaient moins altérés sur le plan cognitif. D) Evolution des troubles suivant le stade de la maladie démentielle Leur fréquence semble s'élever avec l'évolution de la démence. Pour Devanand (Devanand, 1999), des changements subtils de la personnalité tendent à apparaître précocement au cours de la maladie d'Alzheimer. Ils incluent une apathie, une irritabilité et l'impossibilité de fixer son attention. Plus tard, l'agitation, l'agressivité et la désinhibition peuvent survenir. L'auteur a suivi l'évolution de 235 patients dont le diagnostic était celui de maladie d'Alzheimer probable. L'agitation était à la fois le plus fréquent et le plus persistant des symptômes, alors que les idées délirantes paranoïdes et les hallucinations étaient moins durables. La plupart des troubles du comportement, à l'exception des idées délirantes paranoïdes, étaient associés à une plus grande altération cognitive. Pour Rubin (Rubin et al. 1987), sur une période de cinquante mois, le pourcentage de troubles du comportement s'accroît chez les patients souffrant de démence de type Alzheimer. Cet auteur fait état d'un doublement des états d'agitation et des comportements de repli sur soi au cours de cette période. Selon Noblet-Dick (Noblet-Dick et al. 2004), le nombre et la gravité des symptômes psychologiques et comportementaux de la démence (SPCD) augmentaient avec l’évolution de la maladie d'Alzheimer probable chez 60 patients observés à l'aide du NPI (Neuropsychiatric Inventory) dans un hôpital de jour. Ce dernier auteur publie les symptômes suivants selon le stade évolutif : Tableau 1
En conclusion, ces auteurs observent une évolution où les troubles comportementaux et psychotiques semblent supplanter chronologiquement les troubles psychologiques et de l’humeur. E) Coupe transversale dans notre service Lors d'une coupe transversale réalisée en septembre 2001 avec la grille CMAI (Cohen-Mansfield Agitation Inventory), une personne sur cinq nous est apparue présenter un trouble positif. Les divers troubles du comportement rencontrés étaient les suivants : - agitation spontanée ou provoquée par les soins, ou encore par une présence, surtout si elle est inattentive. L'agitation est souvent présente le soir. - agressivité verbale ou physique contre les soignants, la famille ou contre les autres résidents ou bien à l'encontre des bénévoles. Nous avons noté les items du CMAI dont la prévalence était la plus élevée : - le fait de saisir les personnes ou des objets, - l'opposition à toute approche soignante, - les plaintes répétitives. III. Conséquences des troubles du comportement chez les aidants informels et formels Les troubles positifs du comportement sont une importante cause d'institutionnalisation par épuisement de la famille du malade. L'agitation et l'agressivité sont très fortement corrélées à une altération du moral, du fonctionnement social et aussi à une forte somatisation chez le personnel soignant (Léger et al. 2001). IV. Evaluation des troubles du comportement A) Le NPI (Neuropsychiatric Inventory, en français : inventaire neuropsychiatrique) Les troubles du comportement et la psychopathologie sont au mieux décrits par le NPI. Ci-dessous la liste des items du NPI avec leur numérotation par lettres. A. Idées délirantes Le patient/la patiente croit-il/elle des choses dont vous savez qu'elles ne sont pas vraies ? Il s’agit souvent d’un délire de préjudice avec persécution par un tiers mal intentionné. Le préjudice est souvent relatif aux biens (spoliation, vols) ou à la personne (agression). B. Hallucinations Par exemple, a-t-il/elle des visions ou entend-il/elle des voix ? Semble-t-il/elle voir, entendre ou percevoir des choses qui n'existent pas ? Chez la personne âgée démente, les hallucinations visuelles et auditives sont les plus fréquentes. C. Agitation/Agressivité Y-a-t-il des périodes pendant lesquelles le patient/la patiente refuse de coopérer ou ne laisse pas les gens l'aider ? Est-il difficile de l'amener à faire certaines activités ? D. Dépression/Dysphorie Le patient/la patiente semble-t-il/elle triste ou déprimé(e) ? Dit-il/elle qu'il/elle se sent triste ou déprimé (e) ? E. Anxiété Le patient/la patiente est-il/elle très nerveux(se), inquiet(ète) ou effrayé(e) sans raison apparente ? Semble-t-il/elle très tendu(e) ou agité(e) ? Le patient/la patiente a-t-il/elle peur d'être séparé(e) de vous ? F. Exaltation de l'humeur/Euphorie Le patient/la patiente semble-t-il/elle trop joyeux(se) ou heureux(se) sans aucune raison ? G. Apathie/Indifférence Le patient/la patiente a-t-il/elle perdu tout intérêt pour le monde qui l'entoure ? H. Impulsivité Le patient/la patiente semble-t-il/elle agir de manière impulsive sans réfléchir ? I. Irritabilité/Instabilité de l'humeur Le patient/la patiente est-il/elle irritable, faut-il peu de choses pour le/la perturber ? J. Comportement moteur aberrant Le patient/la patiente fait-il/elle les cent pas, refait-il/elle sans cesse les mêmes choses comme ouvrir les placards ou les tiroirs, tripoter des objets ou enrouler de la ficelle ou du fil ? K. Sommeil Le patient/la patiente a-t-il/elle des difficultés pour dormir (ne pas prendre en compte le simple fait que le patient se relève une ou 2 fois par nuit pour aller aux toilettes en se rendormant immédiatement) ? Se lève-t-il/elle la nuit ? Déambule-t-il/elle, s'habille-t-il/elle, ou gêne-t-il/elle votre sommeil ? L. Troubles de l'appétit et de l'alimentation Y a-t-il eu des modifications dans l'appétit, le poids ou les habitudes alimentaires du patient. Ces troubles peuvent être évalués selon le degré de difficulté éprouvé par l’entourage : 0 : pas éprouvant du tout 1 : légèrement éprouvant 2 : assez éprouvant 3 : moyennement éprouvant 4 : plutôt éprouvant B) Le CMAI (voir site Internet cité en début d’exposé à la rubrique « démences »). V. Signification des troubles du comportement A) Rappels sur les troubles du comportement Un trouble du comportement n'est jamais gratuit. Il recèle toujours une cause, ou plutôt des facteurs causaux et déclencheurs qui peuvent se révéler, souvent après une observation minutieuse, ou bien demeurer inconnus. Ce trouble possède souvent un but, lui aussi plus ou moins difficile, voire impossible à déchiffrer. Pour Rawling (Rawling et al. 2001), un trouble du comportement n'est pas une maladie mais un symptôme survenant chez un malade. Le trouble du comportement peut être décrit soit comme perturbé, soit comme perturbateur. Les comportements perturbés sont pour cet auteur le résultat d'une situation psychiatrique ou médicale. Ils incluent les comportements directement liés aux hallucinations et aux idées délirantes. Ils sont accessibles au traitement médicamenteux. Les comportements perturbateurs, quant à eux, seraient la conséquence de la désinhibition du contrôle interne et du conditionnement social. Ils seraient moins sensibles au traitement médicamenteux et répondraient mieux à l'approche comportementale. |
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