B.Les banques françaises face à « l’enronite » Les banques françaises ont relativement bien résisté dans cet environnement de scandales financiers, contrairement à leurs concurrents européens, du fait que le secteur bancaire français s’appuie sur un socle domestique relativement solide. La consommation de crédits pour les particuliers s’est maintenue et la montée du risque PME ne s’est pas fait sentir, soutenant ainsi les performances des activités de détail des grands réseaux en 2001 et 2002. En outre, ceux-ci ont sensiblement amélioré leur productivité au cours de ces dernières années, grâce à des projets de réduction des coûts, d’abord onéreux (comme les plans de départs à la retraite) mais payants à terme. D'autre part, la profession bancaire française semble avoir tiré les leçons des crises précédentes, notamment celle de l’immobilier. Depuis, la prudence dans la sélection des dossiers de crédits les caractérise. On peut à cet égard noter un certain contraste avec les Allemands. Toutefois, même si les activités de détail ne devraient pas connaître de détérioration cette année, les établissements français devront gérer avec précaution la hausse du risque PME, une réalité illustrée par l’augmentation croissante des faillites en France.
1.La banque d’investissement et de financement Les banques subissent de plein fouet la déprime des Bourses et devront faire le dos rond, notamment dans les activités de marchés actions. Dans le domaine du financement des grandes entreprises, la prudence des banques françaises devrait une nouvelle fois payer. Elles ont notamment beaucoup réduit leur exposition aux Etats-Unis au cours de ces dernières années car elles ont anticipé l’accroissement du risque dans ce pays depuis deux ans.
Le Crédit Lyonnais, dont les activités de banque de financement affichent une perte de 14 M € en 2001, est directement affecté par cette montée du risque.
En revanche, la banque d’investissement, regroupant les activités de courtage actions et d'émissions primaires, améliore son bénéfice net de 56 % à 142 M €, contre 91 M € en 2000, en intégrant toutefois 38 M € de plus-values liées à la vente de G-Trade 6. Quant à la gestion d’actifs, son résultat net de 212 M €, en baisse de 8,6 %, est marqué par la baisse des marchés boursiers et par des investissements destinés à développer l’activité. Malgré les incertitudes entourant 2002, Jean Peyrelevade a tenu à afficher sa confiance. « Nous générons désormais une marge d’autofinancement de 400 à 500 M € par an », a-t-il souligné. De quoi permettre au Crédit Lyonnais de se développer en toute autonomie, jusqu’à ce que son sort soit scellé.
A la Société Générale, même si elle améliore sa rentabilité par rapport au quatrième trimestre 2001, la banque d’investissement et de financement accuse un recul de 34 % de son résultat net, à 167 M €, sur fond de morosité des marchés actions.
A la BNP, comme on pouvait s'y attendre, les activités de marché ont souffert de la crise boursière. Sur les six premiers mois de l’année, le coût du risque a grimpé de 37,7 % à 281 M € pour la banque de financement et d’investissement qui, outre les marchés, intègre le financement des grandes entreprises. Comme beaucoup d'autres, BNP-Paribas a pâti de la faillite d’Enron et de la débacle de Worldcom pour ne citer que ces groupes.
En revanche, les banques françaises doivent gérer des dossiers domestiques épineux, comme France Télécom ou Vivendi Universal, des groupes qui ne peuvent plus se tourner vers les marchés pour trouver des financements ou restructurer leur dette. Les grands banquiers français devront dès lors arbitrer entre gestion de la relation client et gestion du risque. Le choix d'accompagner un grand client dans les temps difficiles peut s’avérer une bonne décision à long terme, même si cela passe par un accroissement de l’exposition à court terme. Toutefois, il est a noté comme élément positif que, dans ce type d’activité, les tarifications reflètent plus finement les profils de risque.
2.La banque de détail S’agissant de la rentabilité des activités de détail sur le marché national, les banques françaises surfent sur une tendance positive. La rentabilité opérationnelle de leurs activités de crédit s’est améliorée de 5 % à 10 % sur le premier semestre 2001. Seules les banques britanniques et espagnoles ont enregistré de meilleures performances en Europe, tandis que la tendance est négative pour la plupart des autres acteurs européens.
Au Crédit Lyonnais, les activités de détail ont montré une grande solidité, avec un produit net bancaire en hausse de 3,6 % à 3,5 Mrd € et un résultat net en croissance de 8,5 % à 503 M €.
Epargnée pour l’heure par une montée significative du risque en France, la banque peut non seulement se vanter, pour la première fois depuis longtemps, de gagner des clients, mais également d’enregistrer un nombre de 7,1 produits par client à fin 2001, contre 6,6 un an auparavant et de surcroît supérieur à celui de la Société Générale.
A la Société Générale, dans le secteur de la banque de détail, on ne signale pas de hausse significative du coût du risque, qui passe de 32 à 34 points de base. La progression du produit net bancaire, de 7 % à 3,7 Mrd €, compense de justesse la hausse parallèle des frais généraux, maintenant ainsi un résultat brut d’exploitation à 1,038 Mrd €. Si le rythme de croissance du chiffre d’affaires reste soutenu, c’est essentiellement grâce aux acquisitions réalisées en 2000 dans la banque de détail et la gestion d'actifs à l’étranger. A périmètre constant, le produit net bancaire est en recul de 7 % par rapport à l’année dernière, faisant plonger le résultat brut d'exploitation de 16 %. Si la banque de détail maintient par ailleurs une croissance soutenue, elle n’améliore son résultat net que de 2 %, à 310 M €.
A la BNP, sur le front de la banque de détail qui se porte bien sur le terrain domestique et à l’étranger, les risques demeurent bien maîtrisés malgré une croissance économique qui s’amenuise au fil des mois. En France, le coût du risque représente 0,3 % des encours de crédits moyens pondérés en glissement annuel.
Sur le plan international, les banques françaises, particulièrement actives dans la syndication, sont parmi les plus exposées à la montée du coût du risque aux Etats-Unis. Leurs engagements américains représentent en moyenne 15 % à 20 % de leurs engagements totaux, tandis que les pays émergents pèsent pour 7 % à 10 %. La prudence, qui prime chez les acteurs français, tant sur le marché domestique qu’à l'international, devrait ainsi contribuer à mieux absorber les chocs.
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