Choix de vie à domicile





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date de publication21.04.2017
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Handicap et aides humaines

Prospection et analyse documentaire autour de travaux de recherche

Choix de vie à domicile

Choix de vie à domicile



« De l’indépendance dans la dépendance » avec un logement adapté et accompagné par des aides humaines.

Par M. Saïd Djafri
1/ De l’institution au domicile : ma quête de liberté
Je suis une personne en situation de handicap, très lourdement dépendante dans les actes de la vie quotidienne, mais totalement autonome dans mes choix. Comme 2 500 autres personnes en France, je suis tétraplégique du fait d’une maladie neuromusculaire - l’amyotrophie spinale - et ce, depuis 43 ans.

Depuis mon enfance et jusqu’à mon entrée dans l’âge adulte, j’ai navigué d’établissements hospitaliers en établissements médico-sociaux, de soins très intensifs en rééducation au long cours, tout en poursuivant une scolarité ordinaire m’amenant jusqu’en licence de psychologie. Si ma famille a toujours été formidablement soutenante, j’ai très tôt été séparé d’elle pour recevoir tous les soins dont j’avais besoin, en établissement.

Mais à l’adolescence puis à l’âge adulte, la vie en institution m’est devenue insupportable : pas de vie sociale, pas de vie privée ni professionnelle. Bref : un lourd sentiment d’être assisté, plongé dans une vie végétative - à mon avis, au plus grand confort et pour la plus grande sécurité de tous ! - et privé de ma liberté.

Une première tentative de retour à domicile au début des années 90, chez mon frère lui aussi malade, a échoué faute d’une offre suffisante et adaptée en aides humaines et en soins à domicile. Je suis revenu en MAS. Plus tard, ma soeur est tragiquement décédée en établissement, et je n’ai pas voulu subir le même destin, fait d’abus de pouvoir et de contraintes de la collectivité causant souffrance et traumatisme jusqu’à la pire des fins. C’est en 1997 que je prends la décision d’une nouvelle « expérience à domicile ».

2/ Du chaos du domicile à une plus juste compensation de mon handicap : ma quête de justice

Les premières années ont été difficiles : logement inadéquat, aidants insuffisamment formés ou disponibles, incompréhension de mon projet de vie par les acteurs sociaux, recours fréquent aux services départementaux d’incendie et de secours (faute de dispositifs budgétaires en terme de compensation), etc. Bref, une entrée dans la vie chaotique d’un quotidien ordinaire. A cette époque -il y a maintenant 15 ans de cela-, je commence mon combat pour faire reconnaître mes besoins comme moyen de compensation au handicap et ainsi rendre possible la vie à domicile dans des conditions dignes et sûres. Sans cela, pas de liberté, pas de citoyenneté possibles!

Il aura été long le chemin pour arriver en 2008 à un tournant : je fais le pari d’obtenir un logement adapté à l’évolution de ma maladie et à ses conséquences sur ma dépendance, et de travailler en quasi maître d’ouvrage, avec un bailleur social et ses équipes, en mobilisant des intervenants pluridisciplinaires. L’aménagement de mon logement dans lequel je vis toujours aujourd’hui de façon autonome, indépendante et sécurisée, ne se résume pas à des caractéristiques architecturales; il tient compte des spécificités et des contraintes liées à mon handicap.
L’adaptation de ce logement - de cet environnement - intègre aménagement du gros oeuvre bien sûr, mais aussi et surtout : aides techniques (baguette pour tourner les pages d’un livre, paille pour boire dans un verre, bâton pour se gratter le visage, coussin rehausseur, etc.), et aides technologiques comme la domotique incluant les processus de contrôle de l’environnement (pilotage des accès au logement et à l’immeuble, gestion des prises de courant, éclairages et des appareils multimédia) ou le vidéophone pour guider les aides humaines dans les tâches d’assistance d’une pièce à l’autre.

3/ L’aide humaine comme moyen de compensation de mon handicap : une éthique de la relation

Nul doute que la technologie renforce mon indépendance. Mais les aides humaines restent indispensables. Pour moi, l’aide humaine est synonyme d’accompagnement mais un accompagnement qui, dans le cas d’une personne dépendante sur le plan physique, consiste à faire appel au « corps d’autrui » pour exécuter des tâches courantes, le plus souvent nécessairement personnelles et intimes, sous la conduite ou le pilotage de la personne handicapée. Toutefois, il n’est pas sans risques de subir l’intrusion dans sa vie privée.

Tout ceci n’est pas sans enjeux. L’essentiel réside dans la qualité du dialogue aidant-personne en situation de handicap, instaurée dès le début de la relation. L’aidant doit effectuer des actions par un processus de compensation : il met à disposition pendant quelques heures, un «corps fonctionnel» à quelqu’un qui n’en dispose pas ou plus, sans pour autant agir comme un robot sans conscience. C’est une question de position de l’aidant : L’acteur aidant devra se positionner comme une extension mécanique de la personne aidée, qui a fait le choix légitime du droit à une vie indépendante dans la dépendance. Dans cette relation, il faut pouvoir arriver à une compréhension mutuelle de la frontière entre nécessité et exigence : des tâches rendues nécessaire par le handicap ne sont pas des exigences abusives d’un usagé en situation de handicap. Tout ceci requiert une bonne dose de psychologie, un solide sens de l’observation, un esprit affûté en permanence, une capacité à distinguer les moments dans lesquels l’intervenant doit s’effacer pour diminuer la dépendance.

Dans ce contexte, parce que je le souhaite et le peux, je forme moi-même les intervenants (débutants ou étudiants, diplômés ou non) au maintien de mon autonomie et de mon indépendance. En effet, je recherche dans l’aide humaine des personnes qui vont m’aider et m’accompagner dans des gestes d’assistance, et surtout qui ne vont pas me manipuler comme un pantin dans un corps prisonnier.
4/ Les aides humaines comme dispositif : une composition sur mesure

Dans le débat sur les avantages et inconvénients des différents modes d’intervention des aides humaines en France, j’ai tranché ; je recours aux trois : emploi direct, mandataire et prestataire.

Je collabore avec un service prestataire de proximité qui intervient de façon régulière pour des aides courtes et ponctuelles (une équipe de neuf intervenants à la sélection desquels j’ai été associée, et que j’ai formés pour répondre à mes besoins). J’étais très réfractaire à l’idée de recourir à un prestataire du fait d’expériences passées très défavorables où les rapports étaient empreints d’instrumentalisation et de mercantilisme. J’ai accepté de tenter de nouveau l’expérience, à condition d’être dans une relation de collaboration et de partenariat, ce que j’ai trouvé avec l’ASSAD de Meaux.
Je fais aussi appel à un service mandataire pour un ou deux salariés que j’emploie. Ce service m’apporte un soutien dans la gestion administrative et juridique dont je reste maître d’oeuvre comme employeur, dans la rédaction des contrats de travail, le recrutement et la formation. En outre, j’ai pu envisager un soutien dans la gestion du traitement de mes autres aidants salariés par le biais du CESU.

Aujourd’hui, je suis désormais administrateur de cette même association. En effet, il est important que les personnes en situation de handicap aient vocation à être partie prenante des services et qu’elles soient actrices à part entière dans l’élaboration d’une offre de service. Force est de constater que ces dernières ne sont pas véritablement toujours impliquées et associées dans l’élaboration des projets de fonctionnement qui les concerne spécifiquement. De cette situation, il résulte que trop souvent, du fait de la méconnaissance du handicap par les dirigeants de ces structures prestataires, les processus d’accompagnement et de prise en charge adoptés ne tiennent pas nécessairement compte des difficultés particulières des personnes handicapées et les place dans des situations difficilement supportables et /ou acceptables. Alors que notre droit à mener notre vie quotidienne comme bon nous semble est reconnu. De ce fait, il est indispensable que les projets de fonctionnement de service dotés de décisions soient aujourd’hui réfléchis différemment. Aussi des résultats positifs ont démontré que c’était possible grâce aux positions concertées de chacun. C’est dans cette perspective de dynamique qu’il est constructif d’avancer pour se prononcer ensemble.
Enfin, je fais appel à des emplois directs que je recrute par le biais d’annonces diverses et de Pôle Emploi, au sein duquel je me déplace moi-même pour faire de l’information et de la sensibilisation collective sur le métier de l’accompagnement auprès du handicap. Ces aidants m’accompagnent la nuit, en déplacement et dans les activités de la vie sociale par exemple. Cette modalité d’intervention engendre des contraintes fortes : préoccupations de management, un vrai turn-over ! Et quelque fois, confrontation à de véritables marchandages de la part de mes salariés (absences, retards, désistement de dernière minute, voir négociation de leur rémunération…), organisation pointue avec tous les impératifs et contraintes que ma situation de handicap implique et qui génèrent beaucoup de stress et de fatigue.

Ces trois modes d’aide humaine, l’orientation proposée par chacun d’eux, permettent de répondre au mieux aux exigences du handicap mais également de couvrir tous les besoins quotidien en termes de soins sanitaires, de confort, d’entretien de l’environnement, d’accompagnement aux divers actes de la vie courante mais également dans les activités de la vie sociale. La complémentarité apportée entre ces trois types d’aide s’avère prometteuse. Elles permettent de trouver toutes les aides nécessaires, de trouver un équilibre dans le fonctionnement vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et de composer avec les impératifs de chacun. Ainsi, je collabore dans une organisation d’aide humaine et de service tripartite. J’orchestre avec les compétences techniques de chacun, leur potentiel repéré, leurs aptitudes physiques, leur fragilité psychologique mais également avec leurs limites qu’il est indispensable de prendre en compte.

5/ Le domicile, c’est possible pour moi, c’est possible pour d’autres !

Je peux affirmer que la vie à domicile est possible malgré un handicap sévère et lourd. Paralysé, le corps réduit à sa plus simple expression, je ne peux esquisser le moindre geste (ma seule autonomie physique se réduisant à trois doigts d’une main), et j’ai pourtant démontré que c’était possible.

Pour cela, les aides humaines sont un moyen de compensation essentiel puisqu’elles constituent fondamentalement une sorte de moteur pour vivre ma vie comme je l’entends : libre, digne, personne à part entière et en sécurité.

Grâce à la longévité de mon parcours - j’ai 43 ans à présent -, je peux témoigner, former, informer, évaluer les capacités au métier de futurs candidats(es), sensibiliser au handicap dans une expertise partagée et ainsi réveiller les consciences.

Aucune amertume : ce n’est pas dans mon tempérament et je n’ai pas d’énergie à gaspiller pour cela. Oh, non ! Toute mon énergie, je la mets au service de la liberté d’action, d’implication et de décision : la mienne et, par-delà, celle de toutes les personnes en situation de handicap.
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  • said.djafri77@hotmail.fr



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