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Croissance démographique et état de droitPierre Matarasso CIRED-CNRS IntroductionLes pays en développement ont, entre eux, des différences qui interdisent les formulations très générales. Le Brésil n'est pas la Guinée, l'Algérie n'est pas la Chine. Pourtant il existe, dans l'économie de la quasi-totalité de ces pays, des traits communs qui les dissocient des pays industriels. Ce sont ces traits que nous allons chercher à dégager. On peut rencontrer, en Corée du Sud, au Brésil ou au Mexique, des situations qui s'apparentent, sur le plan des techniques de production, voire du style de consommation, à des situations que l'on rencontre dans les pays industriels. Mais la population des "quatres Dragons" (Hong Kong, Corée du Sud, Taiwan, Singapour), souvent citée en exemple, n'est que d'une centaine de millions d'habitants. Si une frange industrielle est bel et bien en train de se constituer sur les rivages du Pacifique ou à la frontière nord-américaine du Mexique, les populations concernées restent faibles comparées aux immenses masses d'urbains pauvres ou de ruraux des pays en développement. Le tiers monde ne s'est pas dissous dans le développement, et la croissance démographique aidant, son état s'éloigne chaque jour davantage de celui des nations industrielles. 1-Développement, démographie et enregistrement de l'activité économique Un cadre statistique déficientLa première question que pose l'analyse des faits économiques dans les pays en développement a trait à notre capacité à disposer de l'information pour construire un objet économique complet. Tout ceux qui ont travaillé sur le développement savent qu'en général l'information est limitée et particulièrement l'information quantitative. Cela s'explique par la nature des activités économiques qui se déroulent dans ces pays. Ces activités économiques peuvent être divisées en trois catégories: -les activités économiques recensées, réalisées par des entreprises de statut juridique défini, publiant des comptes et soumises à un impôt sur la production; -les activités économiques "non enregistrées", émanant principalement de regroupements productifs de faits qui ne possèdent pas de forme juridique et échappent à la statistique et à l'impôt; ces activités proviennent également d'entreprises de statut juridique défini ne déclarant pas leur production en totalité; les activités non enregistrées ne sont pas incompatibles avec la mise en oeuvre de techniques modernes; elles peuvent concerner des productions légales ou illégales; -les activités économiques de subsistance produisant, pour les familles, des biens qui ne transitent pas par le marché. Cette classification ne recouvre pas les agents économiques de façon univoque. Par exemple, des entreprises recensées peuvent produire hors contrôle pour le marché noir, des familles d'agriculteurs en régime de subsistance peuvent vendre une partie de leurs productions (légales ou illégales) sur le marché local, travailler de façon temporaire dans une entreprise clandestine, etc.... Tous les agents économiques jouent en réalité sur plusieurs tableaux, et cela est particulièrement vrai dans l'agriculture. L'extension de la partie marchande de l'économie, qui est patente actuellement dans de nombreux pays, ne signifie pas nécessairement une connaissance accrue de cette économie. Les activités non enregistrées concernent la totalité des aspects de la production. La construction d'infrastructures et leur entretien appartiennent, pour une part, à l'économie non enregistrée. Un fraction importante de "services" appartient au monde de l'économie non enregistrée. Comme le souligne M.Serusier(7), une grande partie de l'économie des pays en développement est dans un état patent de "non être statistique" autant pour ce qui concerne la production proprement dite, que pour la circulation de la monnaie (fraude fiscale et corruption) et pour les échanges extérieurs (contrebande massive). Le "Monde de l'Economie" du 14/08/90 donne un ordre de grandeur de ce phénomène pour l'économie indienne. Selon le directeur de l'Institut National des Finances publiques, l'"économie illicite" s'élève aujourd'hui à 48% du PNB. Selon le directeur général des impôts, "l'économie indienne, pour l'essentiel, se passe sous la table"; 8 millions d'Indiens sur 830 millions d'habitants paient l'impôt sur le revenu. Selon le même article, la fraude fiscale représente selon les experts entre 5O% et 80% des revenus déclarés. "Problèmes Economiques" du 24/5/89 reprenant un article de Crédit Lyonnais International évalue la production industrielle du secteur "non organisé" en Inde à 50% de la production industrielle totale. De multiples exemples comparables peuvent être donnés pour le Mexique, le Sénégal, etc....Pratiquement aucun pays en développement n'échappe à ce phénomène. Pour utiliser une comparaison sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir, seule l'activité "recensée" est dotée de "compteurs", de "capteurs de mesure" susceptibles d'alimenter la comptabilité nationale. Seule l'activité recensée émet continûment des enregistrements écrits (factures, déclarations de production...) qui traduisent sa nature et son volume. A l'heure actuelle, une grande partie des chiffres dont on dispose sur l'économie des pays en développement provient d'évaluations (à partir d'enquêtes ou plus généralement d'estimations) et non de "statistiques" au sens du traitement d'une liste exhaustive(1). C'est le cas, par exemple, de la consommation de bois de feu, de la quantification de la population urbaine ou de celle de la population travaillant dans les services (4)(5)(6)(7). Rappelons que plus de 30% de l'énergie primaire consommée dans l'ensemble du tiers monde l'est sous forme de "biomasse" (combustible végétaux et aliments des animaux de trait). Cette énergie est "hors réseaux" et "hors statistiques"(6). On rencontre dans ce cadre général des situations très contrastées. L'espace sur lequel s'étend chacune des économies (enregistrée, non enregistrée, de subsistance) peut être plus ou moins vaste. L'économie de subsistance concerne la majorité de la population de nombreuses régions d'Afrique et d'Asie, elle est plus limitée en Amérique latine. En revanche l'extension de l'économie non enregistrée (ou mal et frauduleusement enregistrée) est patente dans la quasi-totalité des pays en développement. Elle est, avec le taux de croissance démographique et la persistance d'inégalités importantes, un des grands signes distinctifs du sous- développement. Il importe, lorsque l'on tente de caractériser l'économie des pays en développement et en particulier son degré de "modernité", de bien distinguer ce qui est d'ordre institutionnel (l'état de droit) de ce qui est d'ordre technique (emploi de techniques modernes de production) et de ce qui est relatif à la nature des échanges (développement du marché). Localement et jusqu'à une certaine limite, le marché et les techniques modernes se développent au détriment des économies "traditionnelles" (d'autosubsistance et d'échanges coutumiers non marchands). Ce développement n'est aucunement synonyme du renforcement d'un état de droit au niveau économique. Les pays en développement n'ont pas le monopole de la fraude fiscale ou de l'économie "informelle". L'ex-Union Soviétique, l'Italie et d'autres pays européens connaissent le même phénomène dans des proportions diverses. Et si ce phénomène s'avère, comme ce paraît être le cas dans les pays en développement, irréductible, au moins dans un avenir proche, les conséquences en seront considérables pour toute tentative théorique dans le domaine de la science économique. |
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